Introduction: quo vadis, 1on1?
Trois cents épisodes plus tard, on pourrait croire que certains sujets sont épuisés.
Le 1on1, lui, ne l’est pas.
C’est même l’un des rares rituels managériaux qui suscite à la fois de l’adhésion fervente et de la méfiance sincère.
Dans cet épisode, je vais tenter de répondre à une question simple, mais exigeante : le 1on1 est-il un rituel dépassé ?
Le 1on1 comme fondation du leadership relationnel
L’idée centrale du 1on1 est simple : on ne dirige pas une équipe, on dirige des relations.
Et les relations se structurent dans la régularité.
Les épisodes 1 et 192 de ce podcast posaient déjà les bases :
- un 1on1 hebdomadaire,
- 30 minutes,
- la première moitié pour la collaboratrice ou le collaborateur,
- un moment formel, équitable et individuel,
- un rituel au service du lien, pas du contrôle.
Pourquoi ça marche ?
Parce que le 1on1 est un outil qui prend au sérieux la psychologie sociale du travail.
Il active trois mécanismes cruciaux :
- la sécurité : un espace stable pour exprimer besoins, tensions, questions,
- la clarté : aligner attentes, priorités, signaux faibles,
- la reconnaissance : un moment réservé affirmant la valeur de la personne.
Les bénéfices constatés sont récurrents :
- confiance accrue,
- meilleure autonomie via la délégation,
- gain de temps (moins d’interruptions),
- motivation renforcée,
- facilité accrue lors des entretiens annuels grâce au suivi hebdomadaire,
- anticipation des risques RH.
L’histoire le confirme
Le 1on1 moderne s’inspire directement des travaux :
- du Leader–Member Exchange (LMX) (Graen & Uhl-Bien, 1995),
- de la Self-Determination Theory (Deci & Ryan, 1985),
- de la sécurité psychologique (Edmondson, 1999),
- de Manager Tools (2000s).
Toutes ces approches convergent : la relation individuelle est le principal vecteur de performance collective.
Une critique objective du 1on1
Mais si l’on observe le 1on1 sans bienveillance, sans biais, et sans dogme, on découvre aussi ses limites.
Certaines sont structurelles, d’autres psychologiques, d’autres encore organisationnelles.
1. Un rituel conçu pour un monde managérial qui n’existe plus
Conçu pour des équipes plus petites, plus stables, moins distribuées, moins saturées cognitivement.
Aujourd’hui : équipes de 12 à 20 personnes, travail hybride, charge cognitive accrue.
2. Un format qui peut renforcer la verticalité
Même dans une organisation plate, le 1on1 reste une relation asymétrique — ce qui peut recréer de la hiérarchie.
3. Un amplificateur du style du manager
- bon manager → moment précieux
- manager maladroit → moment anxiogène
- manager toxique → outil de domination
4. Un rituel qui peut tourner à vide
Sans intention claire ni préparation :
conversation floue, routine superficielle, “réunion” de politesse.
5. Un risque d’infantilisation
Le 1on1 peut devenir un rituel de validation, créant de la dépendance hiérarchique.
6. Un coût cognitif élevé
Chaque tête-à-tête demande :
- une écoute profonde,
- une disponibilité émotionnelle,
- la capacité à basculer d’un univers mental à un autre.
7. Un espace qui n’est pas naturellement équitable
Les extravertis dominent, les anxieux surinvestissent, les discrets s’effacent.
Le 1on1 reproduit les asymétries relationnelles (effet bien documenté en LMX).
8. Un possible frein à la dynamique collective
Si tout passe par le manager, l’équipe ralentit.
Le 1on1 devient un goulot d’étranglement.
9. Une non-universalité culturelle
Dans certains contextes, le 1on1 est perçu comme intrusif, artificiel, voire menaçant.
Conclusion de l’antithèse : Le 1on1 n’est pas un outil magique.
C’est un format exigeant, fragile, et très dépendant des compétences humaines du manager.
Comment penser le 1on1 aujourd’hui ?
Le 1on1 n’est ni dépassé, ni sacré. Il n’est pas une réponse universelle : c’est un outil relationnel. La seule bonne question est la suivante : comment l’adapter au monde dans lequel nous manageons ?
Cinq questions de recalibration
- Mon équipe a-t-elle un espace ritualisé pour exprimer ce qu’elle ne dit pas ailleurs ?
- Mes 1on1 nourrissent-ils l’autonomie ou la réduisent-ils ?
- La fréquence est-elle adaptée à la taille de mon équipe ?
- Ai-je la discipline émotionnelle nécessaire pour en faire un rituel utile ?
- Le 1on1 est-il notre canal relationnel principal, ou seulement un outil parmi d’autres ?
La valeur du 1on1 ne vient ni de son format, ni de son origine, mais de son intention : une conversation vraie, régulière, responsable.
Quelques conseils pratiques pour renouveler le 1on1
Alléger
- Réduis le format : 20 minutes suffisent largement dans 80 % des cas.
- Ajuste la fréquence : hebdo pour les postes critiques, bimensuel pour les profils autonomes.
- Utilise un canevas minimal :
- Ce qui a compté cette semaine.
- Où tu as besoin de soutien.
- Ce que je devrais savoir.
Repenser
- Retire tous les sujets opérationnels. Le 1:1 sert au lien, pas aux tickets Jira.
- Introduis la réciprocité : “Qu’est-ce que je peux faire différemment pour mieux t’aider ?”
- Recalibre tous les deux mois : garder/retirer/adapter le format.
Contextualiser
- Gen Z : plus court, plus direct, plus fréquent.
- Métiers créatifs/tech : moins de structure, plus d’écoute.
- Organisations plates : renomme (“check-in”, “alignement”).
- Hybride : caméra obligatoire, attention aux signaux faibles.
Principe général
Moins de règle, plus d’intention.
Le bon 1:1 est celui qui sert la relation, pas celui qui respecte un standard.
Références
- Graen, G. B., & Uhl-Bien, M. (1995). Relationship-Based Approach to Leadership: Development of Leader–Member Exchange (LMX) Theory of Leadership over 25 Years: Applying a Multi-Level Multi-Domain Perspective. The Leadership Quarterly, 6(2), 219–247. ScienceDirect
- Deci, E. L., & Ryan, R. M. (1985). Intrinsic Motivation and Self-Determination in Human Behavior. New York: Plenum / Springer. SpringerLink
- Edmondson, A. C. (1999). Psychological Safety and Learning Behavior in Work Teams. Administrative Science Quarterly, 44(2), 350–383. Massachusetts Institute of Technology
- Manager Tools – origine moderne popularisée du format 1on1 (Management Trinity : one-on-ones, feedback, delegation).
Site officiel : https://www.manager-tools.com
Episode préparé avec ChatGPT
