J’ai lu « Le siècle des égarés » de Julia de Funès. Je l’ai écoutée au #HRLevelUp de Genève la semaine dernière.
Elle s’énerve sur scène. Elle attaque des professions populaires (coaching). Elle bafouille, se reprend. Elle arrive sur scène en courant, à l’américaine. Elle parle vite et oublie de respirer. Elle utilise des mots compliqués.
Quelle femme incroyable.
Elle a un charisme d’une authenticité folle. Elle est convaincue par ce qu’elle dit. Elle parle de l’intérieur, ni pour faire plaisir (populiste), ni pour augmenter son attrait (gourou). Elle parle de ce qui est vital pour elle.
Elle a de l’influence alors qu’elle brise beaucoup de « règles » établies par les charlatans de la communication. Elle convainc alors qu’elle ne mets pas en jeu les préceptes contestés (j’essaie de rester poli) de la PNL, de la process comm et de tous les autres modèles sans véritables preuves scientifiques.
Pourquoi est-ce que cela marche? Nous sommes au cœur du mystère humain de l’influence, de l’autorité, du charisme, du pouvoir.
Je reconnais en elle quelqu’un de bien, j’ai confiance en ce qu’elle dit, même si je ne suis pas d’accord avec tout (elle aurait besoin d’explications sur ce qu’est le coaching, par exemple). C’est l’ethos identifié par Aristote, le lien de cette reconnaissance que l’Autre est un peu comme nous.
Je sais qu’elle ne me veut rien, ni bien, ni mal, mais au-delà: elle explique, elle suppose, elle argumente. Elle met de l’émotion dans son discours mais n’en profite pas. Comme Spinoza, elle ne pleure pas, elle ne déteste pas (mais elle dénonce), elle ne se réjouit pas; elle comprend, donc elle explique. C’est le pathos, deuxième aspect de toute parole, théorisé par le même Aristote.
Quelle belle leçon pour nous, coaches et formateurs, de nous concentrer sur ce que sont les gens, sur ce qu’ils ont déjà plutôt que de vouloir à tout prix (souvent élevé) les « former », les « augmenter ».
« Deviens ce que tu es quand tu l’auras appris », disait Pindare, repris par Nietzsche: « Deviens ce que tu es, fais ce que toi seul peut faire ».
Quand même plus puissant qu’un bouquin d’aéroport, non?