Nouvelles organisations, et alors?

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Table des matières

Je participais récemment à l’événement Work of the Future, à Genève, à une fort bonne conférence de Thierry Bonjour sur les nouveaux modèles d’organisation : modèle agile, holacratie, méthode Hoshin.

Qu’est-ce qu’une organisation?

Selon Wikipedia, une organisation est « un groupe social formé d’individus en interaction, ayant un but collectif, mais dont les préférences, les informations, les intérêts et les connaissances peuvent diverger ». Etymologiquement, organisation vient du latin organum et du grec organon pour signifier l’état d’un corps organisé (structuré) au XVème siècle. Plus généralement, organiser, c’est disposer pour rendre apte à la vie. Notons le côté organique (!!) de cette définition.

Nous retrouvons donc les deux parties constituantes de toute organisation: sa structure et son fonctionnement. La structure, ce sont les processus et les procédures, mais aussi les objectifs et les stratégies. Le fonctionnement, ce sont les manières de faire (la culture), les compétences, le style de leadership.

Trois modèles d’organisation

Modèle agile

L’entreprise dite agile s’appuie sur les constats de complexité, de volatilité, d’ambiguïté et d’imprédictibilité des contextes de l’entreprise (le fameux VUCA). En effet, la prévision et l’anticipation deviennent plus difficiles dans des contextes économiques et politiques de plus en plus mouvants.  

Héritière des principes du Kanban et du Lean management (principes de production des industries japonaises), cette pratique met individus et interactions au-dessus des processus. Il est question de produire quelque chose qui marche plutôt que d’expliquer comment ça marche. Plutôt qu’un contrat, l’organisation va travailler la relation avec le client, il sera question d’agir plutôt que de planifier.

Cette forme d’organisation est fondée sur les cultures du changement continu et de l’adaptabilité, avec un but de conformité aux demandes. Au niveau humain, cette forme d’organisation permet de diminuer la distance entre le terrain et le management. Le modèle agile privilégie donc le fonctionnement à la structure.

Holacratie

Dans le modèle de l’holacratie, le principe est de distribuer l’autorité et de responsabiliser les acteurs pour viser l’épanouissement de ses membres et combler la recherche de sens de chacun.  

L’information est transparente, l’amélioration continue est importante, l’autorité est partagée. Le modèle promeut l’auto-organisation et la confiance, une culture du droit à l’erreur et une organisation apprenante. La sélection des collaborateurs et l’évaluation des membres de l’équipe sont complètement différentes, basées sur la motivation et la cooptation. Il n’y a plus de manager, le leadership devenant ainsi un facteur clef de succès.  

En holacratie, chacun.e est responsable de la mission confiée. Le critère de conduite est l’acceptation de la vision et de la mission de l’entreprise. C’est dans ce modèle qu’a été développée la notion de servant leader, le leader au service de l’équipe.

Ce modèle ne privilégie ni la structure ni le fonctionnement mais demande, par rapport à un modèle de management hiérarchique ordinaire, de changer les deux. Nous pouvons faire l’hypothèse que la barrière à l’adoption de ce modèle est élevée pour cette raison.

Méthode Hoshin

La méthode Hoshin, elle, est complètement dédiée à la réalisation des objectifs. On l’appelle aussi management par percée, et à l’instar du Kanban et du Lean, elle provient du monde de l’industrie japonaise (comme la méthode agile d’ailleurs, voir plus haut). La méthode Hoshin est une des composantes du Lean Management.

Les objectifs sont soutenus par un storytelling qui raconte où on ira ensemble, modélisé dans une matrice à quatre entrées. Les équipiers sont organisés en cercles Hoshin, qui sont des cercles de qualité centrés autour d’objectifs. A chaque objectif est associée une récompense, atteignable en une année.  

La conséquence est que, puisque l’employé a choisi l’objectif et la récompense qui y est associée, il se donne tout entier à sa réalisation puisqu’il a un intérêt personnel à sa réalisation : la récompense. C’est une motivation par appropriation de l’objectif, motivation donc extrinsèque (sociale ou financière).

Cette méthode privilégie fortement la structure en ajoutant un petit côté fonctionnement par le truchement du story-telling, même si celui-ci ne sert qu’à justifier la pratique.

Le fonctionnement plus que la structure

Ces modèles sont intéressants, à n’en pas douter. Mais quelle que soit la forme de l’organisation, les compétences nécessaires à ses leaders, qu’ils soient hiérarchiquement désignés ou pivot de leurs équipes, ne sont-elles pas toujours les mêmes ? Les attitudes porteuses ne sont-elles pas identiques, peu importe le modèle? Déléguer, encourager, donner une direction, aider à trouver du sens, écouter, challenger, stimuler, valoriser: aucun de ces verbes ne dépend de la structure.

Chez COAPTA, nous pensons que même si la structure est importante, c’est le fonctionnement qui est déterminant. Pour paraphraser Peter Drucker qui disait que culture eats strategy for breakfast, le fonctionnement mange la structure au petit-déjeuner.

Si nous voulons tout de même travailler la structure, une forme d’intelligence organisationnelle serait d’adapter ces modèles au contexte réel de l’entreprise et de piloter les processus et les objectifs en fonction de la maturité de l’organisation, de l’équipe et des collaborateurs. En partant de la réalité et non d’une image idéalisée de l’organisation, nous pourrions mieux en suivre les évolutions; l’adaptation serait plus naturelle car plus organique (!!). L’organisation ne fait plus de changements pour suivre un modèle mais pour coller à ses besoins.

Notre conviction, c’est que des collaborateurs et collaboratrices au service d’un fonctionnement plus que d’une structure permet une meilleure identification, une meilleure connexion à des principes et des pratiques partagés, un sens plus clair. Nous pensons que c’est au fonctionnement, plus qu’à un modèle d’organisation, qu’il faut travailler. Les modèles appliqués sans vision sont réducteurs, alors qu’une direction et un fonctionnement adaptés ouvrent les horizons et fédèrent.